« Fonctionnement en mode dégradé », « régulation de l’accès aux urgences », « modalités d’accueil adaptées », les glissements sémantiques et autres expressions oxymoriques ne manquent pas pour masquer la destruction du service public de santé.
En pleine saison estivale, alors que la Dordogne accueille près de 2 millions de touristes, le « fonctionnement en mode dégradé » des urgences est régulièrement activé dans les centres hospitaliers du Département. Ainsi, les urgences de Sarlat sont cette semaine, à nouveau régulées par le centre 15 et fermées à toute présentation spontanée. Cette situation traduit un fonctionnement des services d’urgences à flux-tendu depuis de trop nombreuses années. J’ai, à ce titre, co-signé la lettre d’urgence lancée par le Comité de défense de l’hôpital public et de la maternité de Sarlat pour rétablir un service d’urgence de qualité.
Les politiques budgétaires comptables ont eu raison de l’hôpital public et de la souffrance des personnels soignants. La santé des citoyens est pourtant un pilier de la République sociale et l’un des marqueurs les plus significatifs de l’état d’une démocratie.
Les fermetures, même temporaires, sont un drame pour les patients, en particulier dans les départements ruraux comme la Dordogne où la médecine de ville et la médecine spécialisée ont déserté, affaiblissant considérablement l’offre de soins.
Le choix des mots, tant par les responsables politiques que par la presse, ne doit pas nous tromper : le fonctionnement des urgences ne peut être en « mode dégradé » car l’hôpital public n’est pas un simple moteur que l’on peut mettre à l’arrêt mais un service public, porté par les personnels hospitaliers et plus encore, il est un enjeu de santé publique. Un fonctionnement dégradé, synonyme de service abîmé, détérioré, est imposé par une situation de crise, temporaire, mais ne doit pas être une marche inexorable vers un abîme.
Il n’est donc pas concevable, après de multiples alertes, après des mois de pandémie et alors que la variole du singe menace à nouveau la santé des Français, d’imposer aux soignants de continuer de faire plus avec moins. L’énergie que met le Gouvernement dans la normalisation du « fonctionnement dégradé » des services hospitaliers est autant d’énergie qu’il pourrait mettre dans la réflexion sur la reconstruction et le financement de notre hôpital public car, après les temps de crise, viennent les plans de reprise.
Ne perdons jamais cette richesse que nous avons bâtie collectivement : un service public de la santé, financé par la solidarité nationale, au service de tous les citoyens Français, quel que soit leur lieu de vie, quels que soient leurs moyens.