“De la place du consentement dans l’Art”
En cette journée des droits des femmes, retrouvez l’article que je signe dans la prochaine édition du magazine culturel du PCF “L’Ormée”:
« Consentement : nom masculin. Acquiescement donné à un projet ; décision de ne pas s’y opposer.➙ accord, assentiment, permission. Accorder, refuser son consentement. » Le Petit Robert
A l’heure où la parole des femmes se libère chaque jour davantage, où les mots « incestes », « viols », « violences » deviennent de plus en plus omniprésents dans les médias, une thématique transparaît de plus en plus au centre de ces débats : le consentement.
En 2020, la parution du roman autobiographique de Vanessa Springora « Le Consentement » relatant l’emprise psychique d’un homme de pouvoir sur une pré-adolescente, a permis l’émergence de ce mot qui apparait frontalement ou en filigrane dans notre société, depuis le séisme provoqué par l’affaire Weinstein et le début du mouvement #metoo.
Plus qu’à tout autre endroit, le monde artistique bénéficie de différents médiums : cinéma, musique, mode, arts plastiques… accompagné d’une large palette d’accroches publicitaires qui jusqu’à alors muselait leurs victimes non-consentantes tout en les ancrant pour le public dans une image, un désir, un fantasme qui participait à la création d’un mensonge mais également à une vision archaïque et machiste de la femme et cela à perpétuité !
Cette prise de conscience, participe à la redéfinition des termes liés au processus artistique : muse et pygmalion. Tout au long de l’histoire de l’Art nous avons assisté à la prédominance de l’idée de la femme vu au travers de l’œil masculin. 2021 marque les 30 ans du décès de Serge Gainsbourg, l’artiste ayant poussé les limites du rôle de la conception du pygmalion et de sa muse dans sa relation avec Jane Birkin qui malgré son adoration pour lui tentera un timide « J’étais cet objet qui voulait bien l’être » dans son interview de décembre dernier au Monde et qui déclare un peu plus loin : « Dans mon cas, les hommes étaient impressionnants et il y avait de quoi les admirer ! Mais, en relisant l’histoire, je crois que j’ai mélangé à peu près tout. »
Cette notion de pygmalion que l’on retrouve également au sein de l’âge d’or Hollywoodien où les actrices étaient toutes sculptées par un regard masculin : on pense à l’implantation capillaire brûlée de Marilyn Monroe, aux dents arrachées de Rita Hayworth ou à celles limées de Shirley Temple…
Là, réside la clé du consentement, le manque de confiance en soi, la dévalorisation, le mot “femme” devenu synonyme d’objet comme le confirme l’essayiste et journaliste Mona Chollet qui explore au travers de ses écrits la place de la femme dans cet extrait de « Beauté Fatale » :
« La peur de ne pas plaire, de ne pas correspondre aux attentes, la soumission aux jugements extérieurs, la certitude de ne jamais être assez bien pour mériter l’amour et l’attention des autres traduisent et amplifient tout à la fois une insécurité psychique et une auto dévalorisation qui étendent leurs effets à tous les domaines de la vie des femmes. Elles les amènent à tout accepter de leur entourage ; à faire passer leur propre bien-être, leurs intérêts, leur ressenti, après ceux des autres ; à toujours se sentir coupables de quelque chose ; à s’adapter à tout prix, au lieu de fixer leurs propres règles ; à ne pas savoir exister autrement que par la séduction, se condamnant ainsi à un état de subordination permanente ; à se mettre au service de figures masculines admirées, au lieu de poursuivre leurs propres buts. Ainsi, la question du corps pourrait bien constituer un levier essentiel, la clé d’une avancée des droits des femmes sur tous les autres plans, de la lutte contre les violences conjugales à celle contre les inégalités au travail en passant par la défense des droits reproductifs. »
Le mouvement #metoo portée par des actrices comme Asia Argento, Adéle Haenel, Natalie Portman ou les révélations fracassantes de l’animatrice Flavie Flament sur les abus sexuels dont elle a été victime par le photographe intouchable des années 80 David Hamilton ont durablement fait bouger les lignes d’un monde artistique pratiquant jusqu’alors le statu quo.
Récemment, l’actrice anglaise Keira Knightley s’est exprimé en déclarant qu’elle ne souhaitait plus tourner de scènes de nu tournées par un réalisateur et véhiculant des stéréotypes sur la femme qu’elle représenterait de par son personnage. Elle est allée plus en avant en concluant qu’elle accepterait de montrer sa nudité, essentiellement pour raconter la maternité, l’acceptation du corps, mais surtout que ce soit avec une réalisatrice !
En ancrant de plus en plus dans une société et une jeunesse l’importance de la condition féminine, nous participons activement à une révolution humaine et féminine qui a commencé à la fin des années 60 et qui ne doit pas faiblir.
Simone de Beauvoir n’a jamais été autant d’actualité lorsqu’elle écrivait : « C’est par le travail que la femme a en grande partie franchi la distance qui la séparait du mâle ; c’est le travail qui peut seul lui garantir une liberté concrète »
A l’heure actuelle, trop de femmes subissent de plein fouet une précarité qui provoque une inquiétude extrême au sein de ma délégation, il faudrait 1 milliard d’euros pour la seule lutte contre la violence faite aux femmes !
Par la notion de consentement, la femme retrouve son pouvoir originel, le pouvoir de dire non, le pouvoir d’opposition, d’expression et d’élévation de sa condition féminine. Encore une fois, Mona Chollet dans son dernier ouvrage « Sorcières : la puissance invaincue des femmes » narre une véritable chronologie historique de l’histoire féminine et du besoin maladif de l’homme d’étiqueter la femme dans un schéma bien prédéfini. Gare à celle qui n’y rentrera pas, elle finira au bûcher !